vendredi 24 février 2012

N° 139 : Skyrock-Maxximum : The Great Years (D-Shake, Synthesis, Eighth Wonder, Martha Wash...)

Set non disponible

Même si ce set est consacré à l'apogée de la radio FM libre (1988-1992), j'ai souhaité démarrer par une production inédite.

Elle symbolise la face cachée de mes 6 années de collaboration avec Pascal Henninot, ces remixes qui auraient mérité d'être commercialisés, mais qui sont restés à l'état de projet faute d'être compris par des directeurs artistiques totalement hermétiques à la culture club.

En 1993, forts de notre succès avec Abyale ("A kiss from Paris"), Jordy (notre version club dans le plus pur style Steve "Silk" Hurley) et surtout Shanna ("Do me boy"), nous entamons une grande tournée des labels pour proposer nos services en tant que remixers pour des artistes français.
De passage à Neuilly/Seine dans les bureaux de BMG, l'un des A&R de l'époque (c'est comme cela qu'on les surnomme dans notre jargon) accepte de nous laisser faire un essai sur l'acappella d'un nouveau duo français signé peu de temps avant, NATIVE.
Plus que jamais motivés, nous trouvons immédiatement l'inspiration et trois jours plus tard, nous sommes de retour avec une maquette qui sonne déjà comme un "def".

Nous maîtrisons nos synthés, nos samplers, nos rythmiques méchamment ternaires inspirées par nos maîtres (Clivillés & Cole, Steve Silk Hurley, Davis Morales, Masters at Work...).
La modeste table de mixage analogique Fostex 16 pistes "a tout d'une grande" et la couleur du son qui en sort est d'une chaleur et d'une clarté étonnante.
Sur l'intro, le synthé-basse du JX-8P "flangé" dans un effet Boss SE-50 s'en donne à cœur joie. Pour le break, nous samplons des nappes du Juno 106 passées dans son fameux chorus (sans lequel ce synthé perd toute consistance). Le piano si réaliste sort tout droit d'un Roland MKS-20; les violons sont signés d'un expandeur Kurzweil quasiment dédié; les cuivres sont bien sûr estampillés Ensoniq.

Jouant avec les samples, imposant le timestretching, le mix oublie totalement les couplets pour se concentrer sur les voix puissantes du refrain en osant pitcher vers le bas certaines d'entre elles pour les besoins de l'harmonie.
Hélas, à l'écoute de cet arrangement deep-garage novateur qui casse les codes de la variété française, le directeur artistique restera sans réaction voire interdit. Le remix finira à la poubelle.

Tout ceux qui ont pu l'écouter en louent encore aujourd'hui la magie inaltérée et, comme nous, regrettent que le public n'ait pas pu en profiter.
C'est la somme de toutes ces opportunités tuées dans l'œuf qui expliquent en partie pourquoi nous avons fini par disparaître du devant de la scène alors que nous pouvions incarner une soulful house à la française.
Une carrière se joue sur la chance et le coup de pouce du destin. Manifestement, ils ne nous avaient pas choisis.

A ma connaissance, on peut compter sur les doigts d'une main le nombre de producteurs français concernés par ce style, 99% des remixes soulful étant signés par des internationaux, qu'ils soient suisses, brésiliens ou américains.


Pour la playlist, les nostalgiques de cette dance-house des années 80/90 relayée par ses fers de lance Maxximum et Skyrock, y trouveront surement leur compte avec pas mal de titres "oubliés", histoire de ne pas tomber dans la facilité de hits piochés dans diverses compilations.

Les mixes de Eighth Wonder, Roberta Flack, Mac Thornhill ou The Crew sont typiquement LA couleur Skydance; Martha Wash et Margaret Conway rendent hommage à la Max Party; Plus One est l'une de mes découvertes pour le Top Dance; LCO & Sindy, D-Shake, Technotronic et Synthesis rappellent la programmation éclectique de Maxximum.


NATIVE "Si la vie demande ça" (Henninot & De Carey Unreleased Remix) - 1993
MARTHA WASH "Carry on" (12" Dance Mix) - 1992
MARGARET CONWAY "Sure shot" (UK Dub) - 1992
ROBERTA FLACK "Uh-Uh Ooh-Ooh Look Out" (Steve 'Silk' Hurley's House Mix) - 1988
EIGHTH WONDER "Cross My Heart" (Dance Mix) - 1988
PLUS ONE "The song will always be the same" (NYC & Costello Mix) - 1991
LCO & SINDY "Undercover" (Mark Saunders Remix) - 1990
MAC THORNHILL "It's a cruel world" (Club House Mix) - 1988
THE CREW "Free Your Body (Get Dumb)" (Clivilles And Cole Club Mix) - 1990
TECHNOTRONIC "Get up" (Def Mix) - 1989
D-SHAKE "Yaaah" (Freestyle Club Mix) - 1990
SYNTHESIS "Walking away" - 1990

vendredi 17 février 2012

N° 138 : from Disco to Disco (Viola Wills, Cissy Houston,C.J. & CO...)

Set non disponible

Lorsque l'on interroge les gens sur la chanson disco qui a marqué leur esprit, revient inévitablement le "I will survive" de Gloria Gaynor, titre ultra-rabâché et brûlé définitivement lors de la Coupe du Monde 98.
A l'origine, ce titre n'était que la face B du maxi-single "Substitute" et c'est par le plus grand des hasards qu'il devint un tube mondial.

Parmi les titres légendaires figurent pourtant "If i could read your mind" par Viola Wills, hymne du Palace à la fin des années 70. Une mélodie plus classieuse, un break grandiose (j'ai remanié légèrement la version originale pour les besoins du mix)... il est à ranger parmi les trésors méconnus comme "What that all it was" de Jean Carnes, "I love the night life" de Alicia Bridges ou "You stepped into my life" de Melba Moore.
Ce titre a d'ailleurs été repris par un collectif de divas (Stars On 54) à l'occasion de la sortie du film "Studio 54" (1998) retraçant la flamboyance et l'extravagance du mythique club new-yorkais. Ce fut d'ailleurs Ritchie Kaczor, l'un des DJ's résidents, qui popularisa "I will survive", bien qu'ayant vidé la piste lors des premières programmations !

Élevée dans l'esprit bienfaisant du gospel, c'est une mauvaise rencontre (Bobby Brown) qui conduira Whitney Houston sur le chemin de la dépravation jusqu'à ce funeste destin. Dans le monde du show-biz, la Roche tarpéienne est toujours proche du Capitole.
Whitney était la fille de la choriste Cissy Houston dont le titre majeur reste ce "Think it over" qui vient se se placer à l'empyrée de l'arrangement disco empli de violons et de cuivres (puisque produit par Michael "Let's all chant" Zager).
Une fois de plus un petit edit de l'arrangement s'imposait, faute de véritable break.

La B.O.F. de "Truck Turner", joyau mésestimé de la "blaxploitation" est l'œuvre du chanteur-arrangeur et multi-instrumentiste Isaac Hayes, surnommé en son temps le "Moïse noir".
En 1974, il fait ses premiers pas en tant qu'acteur dans cet honnête polar, bien supérieur au célèbre "Shaft" (qui était en fait un nanar de première) tourné 3 ans plus tôt.
On reverra Isaac Hayes dans le rôle du "Duke", extravagant chef d'une horde de délinquants sur une île transformée en pénitencier dans le jubilatoire film "New-York 1997" de John Carpenter (1981).
L'album renferme bien des pépites : le thème principal bien sûr, mais aussi "Blue's Crib", le très funk "Breakthrough" et "Pursuit of the pimpmobile", remarquable titre disco qui, bien qu'aucun maxi n'ait jamais été extrait, fut parfois joué dans les clubs new-yorkais.

Le riff de "You can't hide from yourself" de Teddy Pendergrass fut exhumé par DJ Sneak sur "You can't hide from your bud" en 1997.
La chanson originale qui évoque le thème de la prédestination est ici ré-editée par le gardien du temple Philly Sound, Dimitri From Paris.

"We got our own thing" de C.J. & CO. n'est pas aussi connu que leur tube "Devil's gun", mais méritait le détour. "Le "We got our own thang" de Heavy D and The Boyz s'en inspire légèrement.


Coffee "Casanova" (Original Mix) puis Disco Dust Jap. "Casanova", le re-edit. C'est la reprise un peu kitsch d'une ballade de Loleatta Holloway.


Entrée dans le royaume du sample.

"Delirious" de DJ Q : ça n'est déjà plus du disco mais le sample puise dans son creuset ("Delirium" de Francine McGee).

Topazz "New Millenium" : l'intro psychédélique à la guitare électrique rappelle le "Tommy" des Who ou bien les Wings de Paul McCartney. Les samples de Rhodes et de sax sont issus du "My lady" des Crusaders.
Ce titre fut commercialisé en France par Happy Music.

Royksopp "Poor Leno" : si vous tendez bien l'oreille, vous réaliserez que le titre emprunte la fin du "Fly Robin Fly" de Silver Convention.
Il est extrait du premier (et meilleur album) des norvégiens de Royksopp qui ont hélas progressivement perdu l'enthousiasme et la spontanéité créative des débuts.
Difficile de faire mieux que le fabuleux "Eple".

Jonni Black vs. Una Mas "Raise" : le duo anglais Una Mas (Simon Law/Lee Hambin) semble ici sampler le classique du groupe Inner Life  "Ain't no mountain high enough", si je ne me trompe ?

vendredi 10 février 2012

N° 137 : Garage/Trance - The Passage (Shawn Christopher, Lovebirds, Canadian progressive house...)

Set non disponible

Comment passer du garage à la progressive ? impossible, les chapelles étant trop éloignées.
Pourtant des artistes comme Morales ou Joey Negro savent nous proposer les deux, mais les DJ-remixers multi-casquettes ne sont pas légion.
Le public se déplace généralement pour entendre un certain type de son. S'il ne connait pas à l'avance le style que le DJ va jouer, il ne prendra pas le risque de payer son entrée.

En revanche, les musiciens sur scène se font souvent un devoir de revisiter leurs titres même s'il faut concéder de "dérouler" quelques vieux succès.

Imaginez cette cloison hermétique dans l'univers du cinéma. Aucun réalisateur ne serait capable de se renouveler ou de surprendre, prisonnier des attentes des spectateurs.Mais d'aucuns osent tout comme ce pari fou de réaliser un film muet... et la surprise est parfois au bout.

Voici donc à nouveau l'un de ces sets improbables que personne ne voudra ou ne pourra jouer.

Il prend son envol dans un esprit happy house avec "I want you" de Juliet Roberts (1994) signé du producteur anglais D-Mob, à l'époque directeur artistique et remixer attitré du label Chrysalis/Cool Tempo.

Kerri Chandler n'est pas souvent à l'honneur dans mes sets, même s'il est l'un des plus prolifiques.
Sa version deep-garage de "Make my love" de Shawn Christopher le dispute en qualité à la version originale de Stonebridge.
Merci aux loops de Traktor pour me permettre de proposer un enchaînement interminable.
J'en userai et abuserai au cours de ce set, comme d'habitude.

"Joy & happiness" par Stabbbs est un concept de ce même Stonebridge, toujours excellent dans le garage testostéroné (Ann Consuelo, Tanya Louise, Shauna Davis, House of Virginism, 3rd Nation...).
A moins qu'un chef d'oeuvre ait récemment échappé à mes oreilles (ce que vous ne manquerez pas de me signaler), il ne semble qu'il est désormais un peu en retrait.

Autre figure du garage anglais, CJ Mackintosh propose à nouveau ses rythmiques chaloupées et ses accords magiques sur le "Falling" de Dina Caroll, diva écossaise connue pour sa reprise de "It's too late" de Carole King et surtout "Ain't no man".
Curieusement, cette pépite n'est qu'une "face B" du single "Falling".

Le passage entre soulful garage et trance existe : c'est la deep-house.
Elle inquiète les thuriféraires de la mélodie et ravit ceux que les voix dérangent.

L'allemand Lovebirds est l'un des artistes majeurs de ce style à la fois groovy et répétitif, ici par exemple avec "My man".

Je vous parlais de Morales en introduction, voici l'une de ses réalisations les plus osées : "Throb" de Janet Jackson. Un remix à la démesure de l'artiste. C'est sans doute la frustration de ne pas avoir pu s'exprimer sur l'un des titres de son frère qui a poussé "le Boss" à se surpasser dans cette expérimentation à base de gémissements et de saxophones dissonants, le tout porté par un bassdrum de mammouth.
Un Legendary Mix dont l’appellation n'est pas usurpée.

Les loops de Traktor sont encore de la partie sur le mix avec "Who's n°1" de Dig The New Breed. C'est l'un des grands titres de la mythique (il parait que le terme peut finalement être employé pour désigner une chose rare et exceptionnelle !) compilation "The Sound Of Cleveland City" (1994).
J'imagine ce morceau d'une progression fabuleuse sublimer les foules au Ministry Of Sound.

Passage éclair par la Belgique avec "Magic orchestra" de Frank de Wulf.

Puis surgit la première merveille ! le remix de "Tiny Dancer" de Marco Demark par le canadien Deadmau5, l'un de mes artistes favoris.
L'original est une teenage pop song bien léchée (une reprise sur Elton John d'ailleurs). Deadmau5 réalise l'exploit de nous transporter dans un univers étrange et hypnotique où la voix de Marco Demark rivalise de somptuosité avec celle de Sting ! LA marque des très grands.

Deuxième merveille : "Underlying feeling" de Sylvia Tosun remixé par Adam K & Soha, des canadiens tout comme Deadmau5. Dans la même veine, "Need to feel loved" de Reflekt et "Twilight", autre titre de ce duo originaire de Toronto.

Troisième merveille : "Angel on my shoulder" de Kaskade remixé par le suisse EDX.
Je suppose que tous ces artistes utilisent de redoutables synthés virtuels tels le Predator de Rob Papen et en tirent ces sonorités puissantes totalement dévouées à la progressive et la trance.

Final avec l'un des derniers remixes tubesques du jeune prodige suédois Avicii pour ce qui ressemble étrangement à l'ambiance religieuse de "No Woman no cry" de Bob Marley sur ce "Drowning" de Armin Van Buuren.

vendredi 3 février 2012

N° 136 : De Carey's Jam (Elton John, Glenn Jones, Todd Terje edits...)

Set non disponible

Je viens d'achever une version orientée progressive house pour compléter le pack de mixes de notre premier single "You're not the one".

Malgré les énormes progrès de la technologie depuis les années 90, Pro Tools 8 m'en a fait voir de toutes les couleurs avec des plantages inopinés et fréquents qui ruinaient souvent les efforts d'édition des synthés (en effet certains redémarraient avec les réglages du preset d'origine).
Je pense que la cause est l'accumulation des plug-ins qui n'est pas gérée efficacement par ce logiciel pourtant émérite.

L'essentiel est de garder son sang-froid en ces circonstances tragiques, même si l'on se croit replongé dans l'enfer de la production du temps des synthés analogiques qui se détunaient au fur et à mesure de la journée, des problèmes de synchro midi sur cubase et autres soucis en tous genres que j'ai vécus.


Une petite jam session totalement débridée s'imposait donc pour se remettre de cette semaine sous haute tension.

Intro avec LE titre disco de Monsieur Elton John, "Are you ready for love". Comme je l'indiquait dans l'un de mes premiers articles, Elton John fait partie de ces "essayistes du disco" qui, comme beaucoup d'autres ont fait florès dans l'exercice, même issus d'univers musicaux radicalement opposés (Paul McCartney, Kiss, Rolling Stones...)
Et pourtant ce titre somptueux écrit par deux magiciens du son de Philadelphie (Leroy M. Bell & Casey James) a dû échapper à la grande majorité d'entre vous. Dans la lignée des plus grands tubes des Detroit Spinners !
Il symbolise ma première venue au Patch Club en 1979, époque où je découvrais l'univers empailleté de la nuit.
Le break aux congas et guitare cocotte est habilement exploité par le re-edit de Ashley Beedle qui suit.

Extrait d'un mini-album sorti en 1983, "I am somebody" de Glenn Jones utilise un extrait d'un discours de Martin Luther King. C'est une production signée Robert Wright, arrangeur patenté du label RCA et auteur notamment des remixes de "I can't go for that" de Hall & Oates et "Wear it out" de Starguard.

"Love you madly" de Candela est un one-shot sorti en 1982 sur Arista. Le break est l'occasion d'un interminable solo de synthé-basse.

Dans mon cabinet de curiosités funky, je vous présente le kitsch et enjoué "Dr Jam" de Men at Play. Le maxi sorti en France sur Vogue en 1982 a dû rencontrer un certain succès auprès des radios libres de l'époque dont la funky music était le fond de commerce (NRJ compris).

"Let the music play" de Shannon est l'un des titres fondateurs du style nommé freestyle. Il fut signé sur le label new-yorkais Emergency Records, fer de lance du son italo-disco avec des artistes comme Kano, Vin Zee, ou Firefly.

Todd Terje est un jeune remixer norvégien célèbre pour ses edits de titres célèbres ou improbables. Lui-même prétend sortir ces bootlegs pour le fun et non la célébrité.
"I can't help it" de Michael Jackson" est l'un de ses must-have.
Grand admirateur des pionniers Tom Moulton ou Walter Gibbons, il en copie les techniques pour allonger les mixes par de longs dubs et séquences instrumentales qui mettent en valeur telle ou telle piste de l'arrangement. Ici, le classique "Don't make me wait" des NYC Peech Boys.

Glissement vers la early house la plus underground !

"Alright, alright" des Masters At Work (1987) rappelle qu'avant de devenir l'un des duos les plus groovy et jazzy de la house music, ils débutèrent leur carrière aux côtés de Todd Terry, accouchant de titres électro totalement glacials.

"Let it roll" de Doug Lazy est produit en 1989 par Vaughan Mason (Raze).

"Dreams of Santa Anna" de Orange Lemon sonne étrangement comme le "Alright, alright" des MAW. Logique puisque cette pépite est également signée du roi du recyclage, Todd Terry (1988).

Un "double power" consacré aux Break Boys a.k.a. Frankie Bones et Tommy Musto, icônes de l'underground new-yorkais, avec "And the break goes on" et "Listen to the rhythm flow".

Puisque "Listen to the rhythm flow" prend partiellement pour ossature le "Confusion" de New Order, autant jouer l'original, générique de "Rockline", programme sur la new-wave anglaise proposé par le journaliste Bernard Lenoir et partie intégrante de l'émission-culte des années 80, "Les Enfants du Rock".

Final avec l'un des classiques du Patch Club, le très "happy" remix club d'un titre rock des Comateens, "Don't come back". Ce groupe new-yorkais a également commis deux autres tubes : "Resist her" et  le très funky "Get off my case".